Gros plan sur l'étiquette d'un vêtement avec le symbole de recyclage
12 sept. 2025

Le règlement ESPR vise à accélérer la transition vers des textiles durables en instaurant des règles d’écoconception, des passeports numériques de produits et des critères de performance stricts, dont la mise en œuvre débutera dès 2027. L’industrie devra adapter en conséquence ses systèmes de conception et de gestion des données.

Avec le règlement sur l’écoconception des produits durables (ESPR), l’Union européenne franchit une étape importante vers un avenir plus durable. Ce règlement, entré en vigueur en juin 2024, constitue une pierre angulaire de la stratégie européenne pour la durabilité et l’économie circulaire dans l’industrie textile. Il établit des exigences claires pour améliorer la performance environnementale des produits et informer les consommateurs, afin de favoriser la circularité.

Premier plan de travail : la durabilité au cœur des priorités

Le 16 avril 2025, la Commission européenne a officiellement adopté le plan de travail 2025-2030, le premier livrable concernant l’ESPR. Ce plan définit les produits prioritaires en matière d’écoconception et d’étiquetage énergétique au cours des cinq prochaines années, en fonction de leur potentiel de contribution aux objectifs climatiques, environnementaux et d’efficacité énergétique de l’UE.

Produits prioritaires : plusieurs catégories de produits dont le fer et l’acier, l’aluminium, les textiles (en particulier les vêtements et les chaussures), le mobilier (matelas inclus), les pneus, les détergents, les peintures, les lubrifiants, les produits chimiques, les équipements énergétiques ainsi que les produits informatiques (TIC) et autres appareils électroniques.

Les textiles sont la première catégorie réglementée, en raison de leur impact et du fort potentiel d’amélioration sur la durée de vie des produits, l’efficacité des matériaux, la consommation d’eau et d’énergie, la réduction des déchets et sur ce qui contribue au changement climatique.

Actes délégués : façonner l’avenir pour les vêtements et les chaussures

L’ESPR fixe le cadre général, mais les exigences spécifiques d’écoconception seront précisées par des actes délégués, soit par produit, soit de manière transversale pour des groupes de produits similaires.

  • Pour les textiles, l’acte délégué définissant les exigences d’écoconception est attendu en 2027, avec une mise en œuvre prévue en 2028. Il établira les exigences de performance et d’information spécifiques au produit.
  • Les chaussures sont considérées comme une catégorie de produits distincte en raison de l’utilisation de matériaux différents, de leur fonction et de leurs chaînes d’approvisionnement spécifiques. Une étude visant à évaluer le potentiel d’amélioration de la durabilité environnementale des chaussures dans le cadre de l’ESPR sera réalisée d’ici fin 2027.

Le passeport numérique des produits : levier de transparence

Chaque produit soumis aux mesures d’écoconception devra disposer d’un passeport numérique de produit (Digital Product Passport, DPP) ou d’un système numérique équivalent comme le Registre Européen des Produits pour l’Étiquetage Énergétique (EPREL) pour les produits liés à l’énergie. Le DPP sera basé sur des standards ouverts, non propriétaires et donc interopérables, afin de faciliter l’accès aux données pour les entreprises, les consommateurs et les autorités publiques.

La Commission européenne a déjà lancé des travaux de normalisation concernant les supports de données, l’infrastructure et l’interopérabilité des données pour le DPP. Celui-ci contiendra des informations sur les substances préoccupantes, la composition des matériaux, l’usage et le recyclage des produits, ainsi que sur leur traçabilité tout au long de la chaîne de valeur. L’objectif est de favoriser le déploiement volontaire de solutions de traçabilité et de promouvoir un commerce durable au-delà des frontières de l’UE.

Le calendrier d’adoption et de mise en œuvre du DPP est lié aux actes délégués spécifiques à chaque produit, car les informations à collecter et à inclure dans le DPP seront précisées dans ces actes.

Quelles sont les prochaines étapes pour l’industrie textile concernant l'ESPR ?

Avec l’arrivée de ces changements réglementaires majeurs, l’industrie textile doit adopter une approche proactive :

  • S’approprier le règlement : les marques de vêtements doivent se familiariser avec les exigences de l’ESPR et du DPP, puis évaluer leurs portefeuilles produits actuels au regard de ces critères.
  • Développer une infrastructure numérique : mettre en place une infrastructure digitale adaptée, capable de prendre en charge les données nécessaires au DPP.
  • Collaborer avec les partenaires de la chaîne d’approvisionnement : travailler avec les partenaires de la supply chain, au sein comme en dehors de l’UE, est essentiel pour développer de nouvelles pratiques durables et assurer la cohérence et la transparence.
  • Donner la priorité à la durabilité dans la conception : mettre l’accent sur la durabilité des produits, leur recyclabilité et l’intégration de matières recyclées, car ce sont des exigences obligatoires de l’ESPR.
  • Se préparer aux obligations d’information : être en mesure de fournir des informations complètes et fiables sur les caractéristiques et performances des produits telles que l’empreinte carbone, la consommation d’eau, la durabilité, la réparabilité et la recyclabilité ; ce qui se fera potentiellement au moyen d’un futur label ESPR.
  • Participer aux consultations : prendre part aux discussions importantes comme celles de l’EcoDesign Forum afin de contribuer aux échanges et rester informé·e du développement des exigences.
  • Investir dans le recyclage textile-à-textile : les experts estiment que la Commission européenne reconnaîtra probablement uniquement les matières recyclées issues de textiles comme éligibles aux objectifs de contenu recyclé, excluant ainsi les matières issues de bouteilles PET. L’industrie devrait donc investir dans le développement d’infrastructures et de processus adaptés.
Ayyappan Aks
Ayyappan Aks

Global Technical Director, Global Softlines

Ayyappan est un expert chevronné avec près de 23 ans d'expérience dans les industries de l'habillement, du cuir et de la chaussure. Son champ d’expertise couvre la conception de produits durables, la gestion des substances chimiques, l’objectif zéro rejet de produits chimiques dangereux, ainsi que la conformité en matière de santé et de sécurité environnementales. Il dirige actuellement l'équipe technique d’Intertek Global Softlines et fournit des conseils stratégiques aux clients. Ancien membre du comité de l’Apparel and Footwear International RSL Management (AFIRM) Group, il est titulaire d'un master en chimie et en sciences de l'environnement ainsi que d'un MBA en gestion de l'énergie.

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